Le Credo retrouve son consubstantiel

Source: FSSPX Actualités

Après la révision du Pater voici celle du Credo, cette fois-ci dans le sens d’un retour à la traduction traditionnelle : c’est ce qu’ont décidé les évêques de France réunis lors de la session d’automne de leur assemblée plénière, le 7 novembre 2018.

Mgr Guy de Kerimel, évêque du diocèse de Grenoble et président de la Commission épiscopale pour la liturgie et la pastorale sacramentelle, a eu la délicate mission de présenter au public les modifications du Missel français. 

« C’est un processus assez long... Il y a eu quatre sessions de relecture avec une équipe d’évêques francophones (…). Il n’y a pas de choses d’ampleur » : le prélat a dû multiplier les précautions de langage, tant la liturgie catholique célébrée dans la langue de Racine est souvent le théâtre de confusion et de drames qui n’ont rien à envier aux tragédies du solitaire de Port-Royal... 

En fait, le changement est, en qualité, de plus grande ampleur qu’il n’y paraît : « dans le Credo par exemple, nous ne dirons plus ‘de même nature que le Père’, mais ‘consubstantiel au Père’ », explique Mgr de Kerimel qui reconnaît là « une formule plus affinée sur le plan théologique ». Il était temps de s’en rendre compte. 

On se rappelle que la traduction du Credo « de même nature que le Père » avait provoqué une controverse théologique dans les années 60, où s’étaient illustrées de grandes figures telles que Etienne Gilson ou Jacques Maritain. 

Ce que pointait Jacques Maritain – et, avec lui, beaucoup d’autres théologiens – c’était l’ambiguïté de la nouvelle traduction. 

En effet, en latin, comme en grec, la profession de foi du concile de Nicée (325) affirme que le Fils est « consubstantiel » au Père. Or, cela désigne une unité beaucoup plus forte que le « de même nature ». 

Un père et un fils ici-bas sont « de même nature » : ils partagent la même nature humaine, mais ils sont évidemment deux hommes bien distincts. Le Père et le Fils, quant à eux, non seulement partagent la même nature divine, mais sont un seul Dieu. 

Saint Athanase et saint Hilaire, s'étaient déjà battus au IVe siècle contre une traduction assez proche de ce « de même nature » : nihil novi sub sole. 

« Quand on change de tradition, cela nous bouscule. Il faudra bien une bonne année pour se réhabituer », conclut Mgr de Kerimel. Il est piquant d’entendre qualifier de “tradition” un usage récent et contestable, mais il est rassurant de savoir qu’il suffira d’une année pour se réhabituer à un langage catholique et traditionnel. Un bon signe pour le jour où il faudra réhabituer les fidèles à un rite liturgique vraiment catholique. 

Pour l’heure, la proposition française de retour à la traduction traditionnelle du Credo doit maintenant être validée par Rome, et devrait entrer en vigueur dans la liturgie moderne au premier dimanche de l’Avent 2019. Lorsqu’il s’agit de détruire, les réformes sont autrement plus rapides, surtout sur le terrain. Souhaitons que la correction soit adoptée sans attendre... 

 

Mgr Marcel Lefebvre.

Une traduction hétérodoxe favorisant l’hérésie 

En son temps, Mgr Marcel Lefebvre s’était publiquement élevé contre la traduction fautive du Credo, découvrant ses implications quant à la foi dans le Dieu trinitaire. Ainsi, le 25 décembre 1979 à Ecône, il mettait en garde les fidèles contre les erreurs qui se multiplient à la faveur de ce genre de changement. Il dénonçait les conséquences théologiques graves de l’abandon du mot ‘consubstantiel’, que beaucoup hélas ne mesuraient pas assez : 

« La très sainte Trinité a été protégée de l’erreur par le mot ‘consubstantiel’, qui définit que toutes les Personnes sont égales. Si elles sont consubstantielles, elles ont la même substance, elles sont parfaitement égales. Aucune d’entre elles n’est diminuée par rapport aux autres, et moindre que les autres. C’est pourquoi, il est important de garder ce terme de consubstantiel. Et c’est pour cela que nous résistons lorsque, dans la traduction du Credo français, on dit que le Fils est “de même nature” que le Père. Mais c’est précisément ce qu’ont dit les hérétiques pour éviter le mot de consubstantialité et pour éviter que toutes les Personnes de la Trinité soient égales ! Cela nous fait revenir encore à l’arianisme qui ne veut pas que le Verbe soit égal au Père, qui affirme que le Verbe est moindre que le Père. Alors, vous voyez, l’Eglise, inspirée par le Saint-Esprit, a par ce simple mot de consubstantialité, affirmé définitivement jusqu’à la fin des temps que les trois Personnes de la Sainte Trinité sont égales entre elles. Vous voyez l’importance que cela a pour nous-mêmes, pour chacun d’entre nous. Parce que si les Personnes ne sont pas égales, elles sont donc créées, par conséquent Notre Seigneur Jésus-Christ n’est pas Dieu, nous n’avons pas à l’adorer, nous nous trompons lorsque nous venons adorer Notre Seigneur Jésus-Christ. Mais s’il est égal au Père et au Saint-Esprit, il est Dieu comme eux, et par conséquent – car il n’y a qu’un seul Dieu – nous devons l’adorer, nous devons lui rendre tous les honneurs qui sont dus à Dieu ». 

Lecture : le texte des homélies prononcées par Mgr Lefebvre à Ecône de 1971 à 1991