Le Christ, Rex pacificus / Le problème actuel ou les 3 pierres d'achoppement : la perte de la foi en la divinité de Jésus-Christ ; la pratique de l'oecuménisme ; la diminution de l'autorité / la solution : omnia instaurare in Christo.
Chers Amis et bienfaiteurs,
Dans quelques jours nous célébrerons l’avènement heureux de la Nativité de Notre-Seigneur Jésus-Christ. La sainte Liturgie de l’Avent et du temps de Noël est remplie de la foi en la divinité de Notre-Seigneur. Faisant appel surtout à l’Ancien Testament, là où est prophétisée sa venue, elle imprègne notre intelligence et notre cœur de la grandeur infinie des prérogatives et des droits de l’Enfant nouveau-né.
« Celui qui de toute éternité est né d’un Père sans mère, naît dans le temps d’une Mère sans père ! » (Profession de foi du 11ème Concile de Tolède)
Recevant sa nature humaine de la très Sainte Vierge Marie, sa Mère, dont Il préserve la Virginité, Il prouve par là même qu’Il n’a rien perdu de sa Divinité. « Dans le buisson que voyait Moïse et qui ne se consumait pas, nous reconnaissons votre louable Virginité conservée. » (Antienne des Laudes, 1er Janvier) Vrai Dieu, vrai homme, il plaît à l’Eglise d’accueillir le Sauveur Jésus en l’honorant du titre de Roi.
Le Roi de paix, Rex pacificus. Ici, nous aimerions développer un peu cette vérité, qui est comme au cœur de la crise qui secoue l’Eglise et qui conditionne les relations de la Fraternité Saint-Pie X avec le Saint-Siège.
En effet, il nous semble qu’on peut résumer le fond du problème actuel dans une perte de la foi en la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Oh ! Certes beaucoup protestent qu’ils croient que Jésus est Dieu, mais bien peu sont prêts à tirer les conséquences concrètes de cette vérité fondamentale qui éclatera aux yeux du monde entier à la fin des temps. A ce moment-là, Il laissera enfin resplendir sa gloire dans toute sa perfection. L’étendue de ses pouvoirs sur toute créature sera telle que tous les hommes – païens, chrétiens, athées, mécréants, bandits et fidèles –, tous seront prosternés devant Lui, car à l’évocation de son Nom tout genou fléchira sur la terre comme au ciel. (cf. Phil. 2,10)
Pour le court moment de sa vie terrestre durant laquelle Il a pris plaisir à être parmi nous, Il a caché en partie sa souveraineté. Mais ce ne fut que le temps de l’épreuve, le temps d’accomplir sa mission rédemptrice : « Il est mort pour nos péchés » (1 Cor. 15,3).
Mais pendant ce temps où Il a caché à nos yeux sa toute puissance, Il ne l’a en rien perdue. « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre » (cf. Jn 1,3).
Le refus pratique de la divinité de Notre Seigneur se manifeste souvent dans l’histoire des hommes par le rejet de sa Royauté, c’est déjà le titre et la raison de sa condamnation : « Jesus Nazarenus, Rex Judæorum » (Jn 19,19).
Et dans l’histoire bien souvent, le rejet de Dieu se manifeste par le rejet de la soumission à Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Il faut arriver au milieu du XXe siècle pour assister à cet incroyable événement qui permit de voir un concile qui, soi-disant au nom de l’adaptation à la situation concrète de la société humaine en pleine décadence, modifia la proclamation de tous les âges : « Il faut qu’Il règne » (1 Cor. 15,25). On prétend que cette manière de faire serait en harmonie avec les Evangiles, alors que c’est tout le contraire.
Les sophistes du libéralisme ont fait dire que l’Etat, la société humaine, elle aussi créature de Dieu, devait traiter à égalité l’unique vraie religion et toutes les fausses, accordant également à chacune le droit d’exister, de se développer sans contrainte et d’exercer son culte.
On prétendit par là s’opposer aux abus de l’Etat totalitaire qui écrase injustement les êtres humains et opprime la conscience de chacun. Les francs-maçons eux-mêmes ont dit alors leur joie d’entendre résonner sous la coupole de Saint-Pierre ces thèses qui leur sont propres (cf. Yves Marsaudon, L’œcuménisme vu par un franc-maçon de tradition, 1964).
Il y a bien évidemment quelque chose de vrai dans le mal dénoncé. Mais le remède est celui que l’Eglise a toujours indiqué : la tolérance. Le droit à la liberté religieuse, tel qu’il est proclamé à Vatican II, est autre chose. C’est là un des points sur lesquels nous achoppons avec le Saint-Siège.
Cette liberté religieuse, mettant sur un pied d’égalité le vrai et le faux, dispense délibérément l’Etat et la société humaine de leurs devoirs d’honorer et de servir Dieu, leur Créateur. Elle ouvre le chemin à toutes les licences en matière religieuse. C’est comme si, dans l’Eglise, on avait renoncé à la prérogative d’être l’unique voie du salut pour tous les hommes. Ceux qui y croient encore ne le disent plus. Beaucoup font même penser le contraire. Cette concession au monde d’aujourd’hui se fait au prix de la Royauté de Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Une autre conséquence, dans la droite ligne de ce qui vient d’être dit, se voit dans la pratique de l’œcuménisme. Sous prétexte de pouvoir être plus proche de nos « frères séparés », on ne proclame plus ces vérités pourtant salvifiques, parce qu’elles leur sont dures à entendre. On ne cherche même plus, de manière délibérée, à les convertir. L’œcuménisme NE VEUT PLUS CONVERTIR. On a banni ce mot, on le tolère encore, mais au nom de la liberté religieuse ! Où est donc l’Eglise de Notre-Seigneur Jésus-Christ ? Où est passée la fierté des catholiques ? Et ce sont leurs chefs qui les font devenir pusillanimes ! Comme on a pu récemment le constater en France, lorsqu’il fallait blâmer des pièces de théâtre blasphématoires. Si de pareilles offenses avaient été faites contre les musulmans, le pays aurait été mis à feu et à sang ! Les chrétiens sont devenus aujourd’hui tellement mous qu’ils laissent tout faire ! On attente à l’honneur non d’un roi de ce monde, mais du Roi des rois, du Seigneur des seigneurs, Notre Sauveur de qui nous avons tout reçu !
Bien évidemment nous avons à cœur le salut et le retour au bercail de toutes ces âmes si chères au Cœur de Notre Seigneur puisqu’il les a rachetées au prix de sa vie ! Mais la manière de faire actuelle n’a plus rien de commun avec le souci de l’unité de l’Eglise des siècles passés. Tout le monde est supposé bon et, par conséquent, la perspective que certains pourraient se damner éternellement fait crier au scandale. On prêche que l’enfer est vide ou presque. L’enseignement de l’Eglise est tout autre…
Une troisième pierre d’achoppement est encore liée à la diminution de l’autorité.
Notre Seigneur est la tête de l’Eglise. Mais parce qu’Il a voulu que son Eglise fût visible, étant monté aux cieux, Il lui a donné une tête visible qui est son Vicaire sur la terre, Pierre et ses successeurs… A lui seul Notre Seigneur a donné le pouvoir de paître agneaux et brebis, lui seul a un pouvoir plénier, souverain, immédiat sur tous et chacun des membres de l’Eglise. C’est pourquoi l’Eglise s’est toujours proclamée une monarchie, gouvernée par un seul. Certes, le caractère humain du gouvernement rend bien compréhensible la recherche du conseil et des avis de personnes sages, mais une forme de démocratie importée dans l’Eglise par la collégialité et par la parodie parlementaire des conférences épiscopales, permet toutes sortes d’abus et livre à la pression du groupe les dispositions du Droit divin déterminant que chaque diocèse n’a qu’une seule tête, l’évêque du lieu.
L’autorité aujourd’hui est sérieusement ébranlée, non seulement du dehors par la contestation des responsables laïcs qui prétendent à une part de gouvernement, mais aussi bien, à l’intérieur de l’Eglise, par l’introduction d’une quantité de conseils et commissions qui, dans l’atmosphère d’aujourd’hui, empêchent l’exercice juste de l’autorité déléguée par Notre-Seigneur Jésus-Christ.
N’est-il pas saisissant de constater combien, à chacune de ces pierres d’achoppement, nous retrouvons au fond le même problème ? Pour plaire au monde, ou du moins pour s’y adapter et composer avec lui, on a sacrifié d’une manière ou d’une autre l’autorité de Notre-Seigneur Jésus-Christ sur les fidèles chrétiens, sur tous les hommes pour lesquels Il a versé son Sang, sur toutes les nations dont ils sont membres.
Voilà ce qui met à mal l’Eglise. Pour sortir de cette crise, il faut « restaurer toutes choses dans le Christ » (Eph.1,10). Partout et en tout Lui donner la première place, à Lui qui veut être tout en tous. Tant que l’on ne voudra pas quitter cet air libéral qui empeste l’Eglise, celle-ci continuera de dépérir.
C’est à cause de cette douloureuse réalité que nos relations avec Rome sont difficiles.
C’est pourquoi dans la Fraternité nous parlons si souvent de la Royauté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, car elle est le résumé dans la vie pratique de la reconnaissance de sa Divinité. Il a purement et simplement tous les droits sur nous.
Et c’est à Lui que tous les hommes, païens ou catholiques, jeunes ou vieux, riches ou pauvres, puissants ou faibles, tous, absolument tous rendront compte de leur vie ici-bas, – Lui, leur souverain Juge et leur Dieu dont ils ont tout reçu. Espérons que ces lignes montrent combien la doctrine de la Royauté de Notre-Seigneur est actuelle, combien le combat pour cette Royauté de Notre-Seigneur n’est pas désuet, mais au contraire très nécessaire. C’est aujourd’hui une obligation pour survivre.
Daigne Notre Dame, Mère de Jésus, Mère de Dieu, écouter nos prières pour la gloire de son Fils. Qu’elle nous protège, qu’elle garde notre petite Fraternité au milieu de tant de périls, et qu’elle soit notre guide, notre avocate, notre victoire contre nous-mêmes et notre pusillanimité. Qu’elle soit notre espérance, en attendant son triomphe pour lequel nous prions assidûment, qu’elle soit notre joie dès ici-bas et pour l’éternité.
Nos cum prole pia, benedicat Virgo Maria.
+ Bernard Fellay
En la fête de Saint Thomas Apôtre, le 21 décembre 2011