La Contrition parfaite

N° 152 - SOMMAIRE
- Editorial
- Vie spirituelle : La contrition parfaite
- Pour découvrir les Pères de l’Église : Saint Clément de Rome
- Histoire : Sainte Godelieve
- Pédagogie : La tenue à l’Église

« Vouloir satisfaire avec le Christ est d’un grand mérite car c’est un acte désintéressé : nous réparons pour Dieu seul, sans retour sur nous-même. La satisfaction manifeste une réelle charité de l’âme : elle aime Dieu en esprit et en vérité ».

Editorial

Nous venons de méditer sur ce beau mystère de l’Incarnation. Nous avons été sans doute émerveillés par les évènements qui ont entouré cette scène évangélique : la pauvreté de la crèche, la sainteté des personnages, le chant des anges, l’adoration des bergers, l’appel à la foi des Mages.

À y regarder de plus près, cette crèche de Bethléem annonce aussi un évènement que ni la Très Sainte Vierge Marie ni saint Joseph n’ont occulté : la Rédemption. Tout y parle en effet de ce mystère : le bois de la mangeoire sur lequel repose le divin enfant annonce le bois de la croix sur lequel sera étendu le fils de Dieu ; les persécutions dont il fait l’objet nous projettent déjà dans son ministère public : « il est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas reçu » (Jean, Ch. I, vers. 11) ; l’offrande des mages dont la myrrhe n’est que l’image du baume qui servira à son ensevelissement.  Enfin, saint Paul nous révèle ce que furent les premières pensées du Verbe Incarné : « le Christ dit en entrant dans le monde : « Vous n’avez voulu ni sacrifice, ni oblation, mais vous m’avez formé un corps ; vous n’avez agréé ni holocaustes, ni sacrifices pour le péché. Alors j’ai dit : Me voici, je viens ô Dieu, pour faire votre volonté. » (Hébreux, Ch. X, vers. 5)

Le motif principal de l’Incarnation est la Rédemption. Le Verbe Incarné assume une nature humaine pour souffrir et pour mourir sur la croix, perspective à la fois terrible et extraordinaire qui nous plonge dans le coeur du mystère de la charité de Dieu pour sa créature. Notre Seigneur Jésus-Christ effectue en effet ce que nous n’aurions jamais pu accomplir : nouvel Adam, il répare au nom des hommes pour toute la nature humaine. Vrai Dieu, sa satisfaction est d’un mérite infini parce que la personne qui répare n’est autre que la personne du Verbe. La satisfaction cherche à réparer le droit d’autrui qui a été lésé. C’est le bien de celui qui a été offensé qui est recherché. Jésus-Christ s’incarne pour rendre ainsi justice à son Père que le péché a bafoué. Et nous sommes les bénéficiaires indirects de la satisfaction.

Nous sommes appelés à nous unir à l’oeuvre satisfactoire du Christ. C’est tout le sens de cette phrase de saint Paul : « ce qui manque aux souffrances du Christ en ma propre chair, je l’achève pour son corps, qui est l’Église ». (Col. Ch. I, vers. 24) C’est tout le sens du Carême dans lequel nous allons entrer à la fin de ce mois de février : se sacrifier, se mortifier, offrir ses souffrances et ses prières pour nous unir à la satisfaction du Christ. Notre caractère baptismal nous agrège au corps mystique du Christ. Nous ne faisons plus qu’un avec lui car nous participons à sa vie divine. Il faut donc que notre être soit conforme à notre agir c’est-à-dire qu’il faut que nous imitions Notre Seigneur Jésus-Christ et que nous le suivions dans ses joies comme dans ses souffrances : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il renonce à soi-même, qu’il prenne sa croix et me suive. » (Math. Chap. XVI, vers. 24) C’est à ce prix que nous serons saints et que nous nous sauverons.

Vouloir satisfaire avec le Christ est d’un grand mérite car c’est un acte désintéressé : nous réparons pour Dieu seul, sans retour sur nous-même. La satisfaction manifeste une réelle charité de l’âme : elle aime Dieu en esprit et en vérité. Elle veut son bien. Satisfaire nous apprend à purifier les intentions dans nos actions. Dieu a besoin d’âmes qui réparent et qui consolent le coeur du Christ blasphémé, moqué, outragé par les péchés des hommes. Réparer attire de nombreuses grâces sur le monde et mérite la conversion des pêcheurs les plus endurcis. Elle fait parfois appel à l’héroïcité. Mais n’est-ce pas ainsi que Dieu étend son royaume sur la terre ?

A la messe, le prêtre verse une petite goutte d’eau qu’il mêle au vin dans le calice. Unissons-nous à ce geste liturgique qui nous invite à réparer, à expier, à satisfaire en union avec la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ. Il n’y a pas de plus belle manière de nous unir à la Passion du Christ que d’assister au Saint Sacrifice de la messe. Essayons de nous y rendre le plus souvent possible pendant le Carême. C’est à ce prix que nous pourrons satisfaire généreusement et ainsi étendre le royaume de Dieu sur la terre.

Abbé Michel Poinsinet de Sivry
Supérieur du District de Benelux