Comme chaque année, en cette fin d'avril, la réunion des anciens Marines de l'United States Navy bat son plein. Dans la salle où sont regroupées les différentes promotions des années 80, l'effervescence est à son comble. En effet, la plupart des Marines qui ont participé aux opérations dans le golfe Persique à cette époque n'ont pu oublier celui que tout le monde surnommait alors le "roi de la fête" : le lieutenant Malcon !
Par amour du bon Dieu, j'ai accepté !
Comme chaque année, en cette fin d'avril, la réunion des anciens Marines de l'United States Navy bat son plein. Dans la salle où sont regroupées les différentes promotions des années 80, l'effervescence est à son comble. En effet, la plupart des Marines qui ont participé aux opérations dans le golfe Persique à cette époque n'ont pu oublier celui que tout le monde surnommait alors le "roi de la fête" : le lieutenant Malcon !
Le Lieutenant Malcon raconte
Pourtant, celui qui, autrefois, ne ratait aucune festivité, n'était plus apparu aux réunions des anciens depuis près de dix ans. Mais aujourd'hui, le voilà de retour ! Beaucoup de vétérans veulent lui serrer "la pince" et lui demander de ses nouvelles.
Sans se faire prier, Malcom se met à raconter et... bientôt le silence se fait dans la pièce. Aujourd'hui, l'ancien camarade de combat n'a nullement envie de faire rire son auditoire avec une de ses blagues fameuses dont il avait le secret quand il naviguait. Non ! Il désire simplement leur raconter son histoire et leur témoigner la foi qui l'habite aujourd'hui : " Les amis vous vous souvenez de moi, il y a quinze ans. J'étais certes un excellent militaire et un bon camarade mais j'étais surtout un fêtard, qui buvait trop, qui s'amusait sans limite et qui ne prenait jamais rien au sérieux. Heureusement, à trente ans, un peu avant de quitter l'armée, j'ai rencontré une femme merveilleuse, Cathy. Veuve, depuis peu, celle-ci avait deux enfants, une fille et un garçon de dix et douze ans. Je ne sais pas par quel mystère de la Providence cette jeune femme timide et sérieuse a accepté de se marier avec moi. Ce qui est sûr, c'est qu'elle m'a rendu pleinement heureux. Dès notre première rencontre, j'ai aimé ses enfants comme mes propres enfants et j'étais fier de ma nouvelle vie. Je me considérais comme le plus veinard de la terre : mes affaires prospéraient, j'étais en parfaite santé et j'étais entouré par une femme et des gamins formidables.
Mais voici qu'un jour j'entends ma fille, Jill, âgée maintenant de seize ans, se plaindre de fatigues et de migraines. Après une visite chez le docteur, le diagnostic tombe comme un couperet de guillotine : Jill a une leucémie aïgue ! Cette nouvelle m'est insupportable. Jill est une jeune fille formidable, intelligente, toujours joyeuse et enthousiaste qui rêve de devenir médecin !
J'ai découvert que Jésus-Christ m'aimait
La voici maintenant en train de suivre scrupuleusement tous les traitements prescrits par les médecins, mais sans grand résultat. Hélas ! La maladie progresse rapidement. Jill perd du poids, les médicaments lui coupent l'appétit, lui donnent la nausée... Ma femme et moi nous sommes effondrés. Jill, elle, tient bon. Un jour, elle nous explique ce qui lui permet de garder le moral. Lors de ses séjours à l'hôpital, elle discute souvent avec une jeune femme atteinte elle aussi d'une maladie grave. Celle-ci est religieuse franciscaine. Sa bonne humeur et sa bonté sans faille ont impressionné notre fille. Jill, qui n'a guère entendu parler du bon Dieu dans sa famille, s'est mise à étudier le catéchisme, à lire les Évangiles, à prier... Elle nous demande maintenant de l'aider à pouvoir faire sa première communion ainsi que sa confirmation !
En quelques semaines, je réalise que Jill a complètement changé. Avant, elle était une adolescente comme beaucoup d'autres, qui ne pensent qu'à leurs petites occupations, à leur apparence... Maintenant elle écrit dans son journal intime : ' J'étais la personne la plus vaine du monde. Je restais assise devant le miroir, pendant des heures à observer mes cheveux, mes vêtements, mon maquillage. Je voulais attirer le regard de mes copines et des garçons... Maintenant, je regarde dans le miroir et je vois une fille sans cheveux, les yeux exorbités, les dents jaunies par la chimiothérapie. Et pourtant, je suis mille fois plus heureuse qu'avant. Pourquoi ? Parce que j'ai découvert que Jésus-Christ m'aimait. '
Je vous avoue, chers amis, que je ne comprenais rien à ce changement de vie mais je remarquais que Jill, malgré la gravité de la situation, semblait vraiment heureuse, alors j'étais content. Peu à peu, le changement de Jill a eu un effet sur mon épouse. Elles passaient des heures à lire les Évangiles ensemble, à prier le chapelet, à regarder des vies de saints... Un an après le diagnostic, Jill est décédée sereinement portée par les prières de ses nouveaux amis. Je pensais que Cathy allait s'effondrer maintenant que le combat était fini, mais ce fut le contraire. Elle était dans la joie et elle ne cessait de remercier le bon Dieu d'avoir permis à Jill de vivre une vie si riche et d'avoir une mort si paisible.
Quelques mois après le décès de notre fille, je me souviens avoir dit à un collègue: ' Cathy a énormément changé. Elle va à toutes sortes d'activités liées à l'Église. Cela ne me dérange pas car je pense que cela l'aide à survivre à cette douleur incroyable. Même Justin, notre fils est devenu pieux, fait partie de la chorale paroissiale, s'occupe de scouts le week-end... Je ne comprends rien à leur foi et j'ai parfois l'impression d'être un étranger dans mon propre foyer. '
Quand je suis averti, Justin est déjà mort
Dix mois après le décès de Jill, Justin, qui a alors 19 ans, se trouve à la piscine avec un groupe de jeunes scouts. Une bagarre éclate entre les scouts et des jeunes venus de l'extérieur de la ville. Mon fils essaye de calmer l'atmosphère et protége les jeunes dont il a la garde. Un voyou sort aussitôt un couteau et poignarde mon fils à mort. Quand je suis averti, Justin est déjà mort... Je suis à nouveau effondré. Moi, le grand et dur Marine, si sûr de moi, prêt à défendre ma femme et mes enfants, je me retrouve impuissant face à la douleur de ma femme ! Peu après, les policiers attrapent le gamin qui a tué Justin. Malgré ses seize ans, il se retrouve en prison.
Cette nouvelle n'apaise pas ma peine... Je contemple, étonné et admiratif, Cathy continuer à vivre, dans la douleur certes, mais aussi dans une grande paix. Souriante, attentive aux autres, elle progresse dans la foi. Pour lui faire plaisir, j'accepte parfois de l'accompagner à un pèlerinage ou à une messe. Elle n'insiste pas, mais je le sais, elle prie énormément pour ma conversion. Me connaissant, cela risquait de prendre encore de nombreuses années, alors le bon Dieu m'a fait prendre un raccourci...
Nous décidons de prendre un peu de vacances en 1996. Sur une route de campagne, une camionnette percute ma voiture à plus de 150 km/h. Cathy est gravement blessée et meurt dans l'ambulance qui la transporte à l'hôpital. Comme Job, dans la Sainte Écriture -en trois ans- j'ai tout perdu, tous ceux que j'aimais !
Dieu m'attendait à chacun de ces rendez-vous
J'ai traversé une période de chagrin intense. Puis, peu à peu, j'ai voulu mieux comprendre ce qui avait soutenu mes bien-aimés dans leurs épreuves. À mon tour, je me suis mis à lire la Bible, à découvrir Jésus. J'ai ren- contré un prêtre et je l'ai assommé de questions. Finalement, je me suis confessé. Cela a pris des heures ! Mon unique confession datait de mes jeunes années... Pour ma pénitence, il m'a demandé de faire une heure d'adoration eucharistique chaque semaine pendant un mois. J'avoue que je ne savais même pas de quoi il s'agissait. Mon confesseur m'a tout expliqué. J'y ai été la première fois avec des semelles de plomb. Mais après avoir goûté à l'adoration quelques fois, je voulais y retourner encore et encore. Dieu m'attendait à chacun de ces rendez-vous ! Je suis devenu un fervent catholique. Aujourd'hui j''assiste régulièrement à la messe, je fais partie d'un groupe d'hommes qui assurent l'adoration perpétuelle dans ma paroisse et je passe plusieurs heures par semaine devant le Saint-Sacrement. J'essaye de ressembler de plus en plus à Celui que j'adore. Je ne sors plus pour faire la fête, je ne passe plus des heures à jouer au tennis ou à faire de l'aviron... J'ai beaucoup apprécié tout cela à une époque. Mais maintenant, je suis engagé dans une plus grande compétition : je veux devenir un saint et pour cela il n'y a pas trente-six moyens. Je peux vous assurer que c'est un combat de tous les jours ! Il y a des défaites, il y aussi de belles victoires et de grandes joies... Justement, à propos de joie, je veux vous parler de ma rencontre avec Lian Thuong Nugyen.
Une lettre d'adieu
Celui-ci a été offcier dans la marine vietnamienne pendant la guerre du Vietnam. À la fin des conflits, en 1975, il a été prisonnier, puis il a réussi à s'échapper en Malaisie. De là, il est parvenu à rejoindre notre pays. Entre-temps, il n'avait jamais pu avoir de nouvelles de sa famille. Enfin, grâce à la Croix-Rouge, il est parvenu au bout de quinze ans à entrer en contact avec sa femme et ses enfants. Dès lors, son plus vif désir était de les faire venir auprès de lui aux États-Unis. Finalement, il ne restait plus qu'un problème crucial : l’achat des billets d’avion pour tous les membres de sa famille. Comment obtenir l'argent nécessaire? Lian gardait l'espoir d'y arriver, mais un jour, son épouse lui écrivit pour lui conseiller d'arrêter de faire des projets; elle lui expliqua que, pour sa part, elle avait renoncé à ce beau rêve irréalisable ! C'était une lettre d'adieu.
De mon côté, si je n'avais pas pris la décision de ne jamais rien refuser au bon Dieu, je n'aurais sans doute jamais connu Lian. Je vous explique. Un jour, le président du groupe des hommes adorateurs de ma paroisse m'a proposé de faire connaître notre œuvre et de recruter des nouveaux membres adorateurs en sonnant aux portes des différentes maisons de mon quartier. J'avoue que cet apostolat ne me tentait absolument pas. Mais, par amour du bon Dieu, j'ai accepté...
La superbe fête que nous ferons là-haut !
Lian reçut sa lettre d'adieu le 23 avril 1998. Le lendemain, alors que je venais de passer une heure sous la pluie à sonner aux portes d'une rue proche de mon domicile, je me dirigeai vers la maison de Lian dont j'ignorais l'existence. Sa porte était entrouverte. Je frappai. Pas de réponse, mais un léger gémissement. Intrigué, je regardai par la fenêtre et je vis un homme couché par terre dans une mare de sang. Je courus chez le voisin et je lui demandai d’appeler une ambulance. Peu après, les secouristes étaient là. Lian s'était tiré une balle dans la tête. Transporté rapidement à l'hôpital et opéré aussitôt, il survécut à ses blessures. La balle avait traversé le menton et était ressortie au niveau du front sans toucher le cerveau. Après quelques semaines, Lian était en pleine forme. Pendant son hospitalisation, j'ai souvent prié pour lui et je suis allé régulièrement le voir à l'hôpital; nous avons sympathisé. Il m'a expliqué la raison de son geste désespéré. À mon tour, je lui ai raconté mon histoire. Nos vies avaient beaucoup de points communs. Rapidement, Lian est devenu mon meilleur ami. J'ai profité de ma petite fortune pour faire venir son épouse, ses deux fils, leurs épouses et les sept petits-enfants jusqu'en Amérique. Cela se passait il y a deux ans. Aujourd'hui, ils sont tous baptisés !
N'est-ce pas merveilleux ? La famille Thiong Nugyen a découvert l'immense amour de Dieu et moi, j'ai retrouvé le bonheur d'une famille.
Chers camarades, je pense souvent à la superbe fête que nous ferons là-haut, ma famille, mes amis et moi quand nous serons tous réunis (je l'espère !) auprès de notre divin Sauveur et, d'avance, mon cœur tressaille de joie ! "