Le Respect de l’autorité

Source: District de Belgique - Pays-Bas

Par Abbé Vianney de Champeaux

Combien de fois n’entendons-nous ce mot devenu très à la mode : le Respect. « Il faut respecter la nature, tu dois respecter les autres, aie du respect pour les valeurs de cette personne… ». Et si nous essayions de retrouver le vrai sens du respect ? 

Regardons pour cela l’édifice des vertus. Nous y trouvons la vertu de Justice, qui fait rendre à chacun ce qui lui est dû. Dans cette vertu de Justice, la religion nous demande de révérer Dieu en lui rendant un culte de latrie. C’est ce culte que nous rendons avec révérence lorsque nous reconnaissons la grandeur de ce Dieu. Eh bien, le respect s’exprime justement ainsi : reconnaissant la bonté, la grandeur, la miséricorde de Dieu, nous sommes portés à suivre en toutes choses ses préceptes. Nous constatons la bonté de Dieu, et ce constat engendre le respect, c’est-à-dire ce sentiment qui nous porte à lui accorder de la considération en raison même de sa valeur.

Le respect le plus grand ira évidemment à l’Être qui a la plus grande valeur, Dieu. Par la suite, nous témoignerons de plus ou moins de respect à toutes les créatures qui viennent de Lui, en fonction de la valeur que nous devons leur reconnaître. C’est ainsi qu’après le respect de Dieu et de ses préceptes, nous devons témoigner du respect envers ceux qui nous ont donné la vie, participant au pouvoir créateur de Dieu. Puis vient le respect pour tous ceux qui ont une autorité sur nous. Et enfin le respect de tout ce qui est l’image de Dieu, de toutes les âmes proches de Dieu. 

 

  • Respect de Dieu : Ce respect se concrétise dans l’application des trois premiers commandements : « Je suis le Seigneur ton Dieu : tu n’auras pas d’autre Dieu que Moi, Tu ne prononceras pas le nom de Dieu en vain, souviens-toi de sanctifier les fêtes ». Il y a deux préceptes négatifs, et un positif : pour être respectueux envers Dieu, il s’agit ne rien faire ou dire qui aille à son encontre, mais il faut aussi sanctifier les jours par Lui réservés. Si nous ne prenons pas le temps d’honorer Dieu comme Il l’a prescrit, alors comment respecterons-nous ceux qui le représentent ici-bas ? Refuser d’honorer Dieu conduit à terme à l’anarchie.
  • Respect de nos Parents : c’est le quatrième commandement : « Honore ton père et ta mère ». Pourquoi ce respect ? Parce que les parents ont participé à l’œuvre de Dieu, la création, en engendrant des enfants. L’égard qui leur est dû vient de ce lien avec Dieu, et se concrétise dans l’obéissance des enfants. Arrivé à l’âge de prendre son indépendance, l’enfant doit toujours conserver cette déférence, s’abstenant de critiquer ses parents par exemple, mais aussi écoutant leurs conseils, leur témoignant une réelle affection et une grande reconnaissance pour ce don sacré de la vie. Gardons ce respect, cette piété filiale car « la piété est utile à tout : elle a les promesses de la vie présente et celles de la vie future » (St Paul, I, Tim, IV, 8)
  • Respect de l’autorité : Des quatre premiers commandements découle le respect de toute autorité humaine en tant qu’elle est donnée par Dieu. Cette représentation de Dieu à travers des hommes va se décliner en autorité religieuse, et politique.
  • Religieuse : Après Dieu qui nous a donné la vie du corps via nos parents, il faut honorer ceux qui sont chargés de donner et entretenir la vie de l’âme : les membres de la hiérarchie ecclésiastique. L’apôtre Saint Paul enseigne dans l’épître aux Hébreux (XIII, 17) : « Obéissez à vos conducteurs et soyez-leur soumis, car ils veillent sur vos âmes comme devant en rendre compte ».
  • Politique : De même que pour la vie de l’âme, la vie du corps est entretenue par la famille dans une société politique. Dieu ayant créé la société, Il a aussi prévu des chefs pour la diriger, des chefs qui le représentent ici-bas. A ces chefs, témoignons aussi un grand respect. Saint Pierre nous dit dans sa première épître (II, 13) : « Soyez soumis, pour l’amour de Dieu, à toute créature revêtue du pouvoir, soit au Roi comme au souverain, soit au gouverneur comme étant envoyé par lui ». Car si nous leur rendons honneur, c’est indirectement à Dieu que cet honneur est rendu. Les dignités humaines, si élevées soient-elles, n’obtiennent notre respect et nos hommages qu’autant que nous voyons en elles l’image de la puissance même de Dieu.
  • Le respect de notre prochain découle de notre révérence envers Dieu : si vraiment nous sommes conscients que chaque être humain a été créé à l’image de Dieu, et qu’il est capable de Le voir au ciel, alors naturellement, nous respecterons l’œuvre de Dieu, et nous ferons tout pour que nos relations soient empruntes de ce respect. La dignité de l’homme vient initialement de Dieu, et c’est cette provenance qu’il faut respecter. 
  • Le respect de la création est elle aussi œuvre divine : pour cette raison, nous devons en user autant que cela est nécessaire, tout en respectant les lois que Dieu y a posé.

Mais une objection arrive après toutes ces belles considérations : 

Comment avoir du respect pour des parents dépravés, pour des prêtres relâchés, pour des chefs égoïstes ? Peut-on considérer ces hommes comme les images, les représentants de Dieu ? Les honorer, ne serait-ce pas valider leur erreur, participer à leur péché ?

Depuis le péché originel, tout homme naît malheureusement pécheur. La nature de l’homme a été abîmée, mais pas détruite, si bien qu’elle est encore capable d’agir droitement, bien que cela lui soit plus difficile. C’est ainsi que les parents peuvent toujours avoir des enfants et les éduquer, le chef peut toujours diriger, le prêtre peut toujours être l’instrument de Dieu pour dispenser les sacrements, mais tout cela devient plus difficile. Plus les hommes seront loin de Dieu, plus ils auront de mal à voir le bien-fondé de l’autorité, plus ils auront de mal à voir la bonté qui se trouve en chaque être humain.

Il faut donc avoir l’intelligence de distinguer en nos parents, nos supérieurs, notre entourage, d’une part ce qui est de Dieu en eux, et d’autre part leurs défauts, faiblesses. Ce n’est donc ni la perversité, ni la malice de certains d’entre eux que nous respectons, mais l’autorité divine qui est en eux. « Et même les inimitiés, les colères, les haines implacables qu’ils peuvent nourrir contre nous ne sont point des raisons suffisantes pour nous dispenser de nos devoirs envers eux » nous dit le Catéchisme du Concile de Trente (Du Décalogue, 4e commandement, IV). Pour le bien de l’Eglise et de la société, il faut continuer à leur porter les honneurs attachés à leur charge. Et le Catéchisme de préciser :« Cependant, s’ils avaient le malheur d’ordonner quelque chose de mauvais ou d’injuste, comme alors ils n’agiraient plus de par cette autorité légitime qu’ils ont reçue de Dieu, mais en suivant leurs sentiments injustes ou pervers, nous ne serions obligés en aucune façon de leur obéir ».

Soyons donc des chrétiens respectueux de toute autorité venant de Dieu. Mais ne soyons pas pour autant des lâches, qui -sous prétexte de « respect » - acceptent tous les excès. La racine de toute charge honorifique, de toute autorité, se situant en Dieu, l’autorité ne peut nous forcer à renier la loi de ce même Dieu. 

 Respectons également ce qui est plus proche de Dieu par l’autorité, mais aussi et surtout par la sainteté. L’homme saint est en effet plus à même de représenter Dieu ici-bas. Prions donc pour la sanctification de ceux qui en ont le plus besoin : le pape, les évêques, les prêtres ! Prions aussi pour les chefs d’états ! La conversion de ces représentants de Dieu sera bien plus efficace que toutes les actions politiques !

Article paru dans le numéro 155 de la revue « Pour qu’il Règne » de mai 2023